
Les pitbulls et les chiens appartenant à d’« autres races dangereuses » seront interdits sur le territoire montréalais à compter de septembre, a annoncé le maire Denis Coderre samedi matin. Mais les citoyens qui possèdent déjà de tels chiens pourront garder leur animal pourvu que celui-ci soit enregistré et stérilisé et qu’il porte une muselière dans les lieux publics.
La confirmation de la cause du décès de Christiane Vadnais attribuable à l’attaque d’un pitbull a incité l’administration Coderre à précipiter sa décision concernant les chiens dangereux.
Ainsi, une modification sera apportée au règlement sur le contrôle des animaux afin d’interdire les chiens de type pitbulls et « autres races dangereuses ». Le maire Coderre n’a pas listé les autres races qui pourraient être touchées, mais il a évoqué les malamutes, les rottweillers et les dobermans. « Ça va être évolutif. […] Aujourd’hui, on parle du pitbull, mais il y a déjà des experts qui disent : voici, potentiellement, il y a une liste qui existe. Il y a certaines races qu’on doit regarder de façon plus précise », a expliqué le maire. « Le problème est souvent aux deux bouts de la laisse. »
Montréal mettra en place des brigades canines supplémentaires avec le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), augmentera de façon « significative » les amendes et mettra en place des mesures pour s’assurer de la conformité des bâtiments et des aménagements des cours arrière des propriétaires de pitbulls et autres chiens dangereux. « Il faut vraiment couvrir tous les angles », a indiqué M. Coderre qui dit vouloir éviter que d’autres drames, comme la mort de Mme Vadnais, se reproduisent.
Mais contrairement à la Ville de Québec qui interdira les pitbulls et forcera les propriétaires actuels à se débarrasser de leur animal dans un délai de six mois, Montréal a prévu des mesures transitoires pour ceux qui possèdent déjà de tels chiens. Ainsi, les propriétaires actuels pourront garder leur chien, mais celui-ci devra être enregistré, stérilisé et muni d’une micropuce, en plus de porter une muselière dans les lieux publics.
Montréal compte environ 150 000 chiens, mais seulement 14 % d’entre eux sont enregistrés auprès de la municipalité même si le règlement actuel oblige déjà les propriétaires à enregistrer leur animal.
Denis Coderre a indiqué que la Ville examinerait d’autres éléments, comme la capacité des propriétaires à posséder un chien. « Un des critères pourrait être la question du casier judiciaire », a dit le maire.
Par la même occasion, la Ville de Montréal dit vouloir s’attaquer au problème de la sécurité des cours privées des résidences où vivent des chiens potentiellement dangereux. M. Coderre n’a pas manqué de rappeler que la victime de l’attaque mortelle d’un pitbull, Christiane Vadnais, s’est fait mordre dans son propre jardin, par un chien qui avait réussi à traverser une clôture mal entretenue.
Le projet de règlement sera déposé au conseil municipal du mois pour une adoption en septembre.
Contestations multiples
La Société canadienne pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA) de Montréal n’a pas tardé à annoncer qu’elle s’opposait à toute interdiction visant une race spécifique.
L’organisme dit envisager tous les recours, y compris une contestation devant les tribunaux, pour empêcher la Ville de Montréal de bannir les pitbulls.
L’administration Coderre mise sur la peur et les préjugés pour faire adopter un règlement « discriminatoire » et « presque impossible » à appliquer, dénonce la SPCA, qui préconise plutôt la mise en place de stratégies d’action et de prévention élaborées par des experts en comportements canins pour contrer les agressions.
Propriétaire d’un pitbull depuis deux ans, Camille Robert abonde dans ce sens, déplorant la campagne de peur perpétrée par les médias et les pouvoirs publics à l’endroit de ces chiens. « Le problème est ailleurs, affirme la jeune femme. Il faut réfléchir aux circonstances entourant une attaque, plutôt que de montrer du doigt une race de chien en particulier. »
Selon elle, les mesures annoncées par la Ville de Montréal ne sont pas mauvaises — « mis à part la muselière obligatoire » —, mais elles ne devraient pas se limiter aux pitbulls. « L’obligation d’enregistrer et de stériliser son animal devrait être obligatoire pour tout le monde », renchérit Camille Robert. À son sens, la Ville devrait plutôt renforcer sa lutte contre les usines à chiots qui constitue un véritable problème, notamment en ce qui concerne le surpeuplement.
Renverser les préjugés
Pour tenter de renverser les préjugés à l’endroit des pitbulls, de nombreux groupes, tant à Montréal qu’ailleurs au Québec, sont apparus au cours des derniers mois sur les réseaux sociaux. C’est le cas, entre autres, de Pitbull Québec qui vise à briser les préjugés à l’égard de ces chiens.
En ce sens, le groupe organise d’ailleurs une manifestation à Montréal le 16 juillet prochain pour dénoncer la « législation spécifique des races » qui interdit certains types d’animaux. Chiens et maîtres seront donc attendus à la mi-juillet au parc Pélican dans l’arrondissement de Rosemont–La-Petite-Patrie à compter de 11 h. À un peu moins d’un mois du rassemblement, près de 2000 personnes ont indiqué sur la page Facebook de l’événement qu’elles comptaient participer. La date et le trajet ont déjà été enregistrés auprès du SPVM.
Avec La Presse canadienne